Les hirondelles font le printemps à Blonay - COMM'une info n° 78

Publié le 7 mai 2024
Les premières hirondelles de fenêtre ont fait leur retour à Blonay le 5 avril dernier. Le centre du village est particulièrement apprécié de ces oiseaux aujourd’hui potentiellement menacés de disparition. On fait le point avec Pierre Goeldlin, ornithologue blonaysan.

Vous ne verrez désormais plus le centre de Blonay de la même façon. Depuis la place du Village, il suffit en effet de lever le nez pour apercevoir de nombreux nids d’hirondelles de fenêtre accrochés çà et là sous les avant-toits des bâtiments abritant notamment des surfaces commerciales. Protégé par la loi, ce passereau est classé sur la liste rouge de la Confédération comme « potentiellement menacé ». L’espèce, qui vit en colonie, débute sa migration en septembre pour passer l’hiver au sud du Sahara. Elle revient dans nos contrées courant avril, pour débuter sa nidification. Durant cette période, elle peut parcourir jusqu’à 10'000 kilomètres.

Espèce menacée

Si on estimait sa population entre 100'000 et 200'000 couples dans les années 90, aujourd’hui, ce nombre s’est réduit de près d’un tiers. Plusieurs raisons expliquent cela. Parmi les principales, on relèvera le manque de nourriture – l’hirondelle se nourrit essentiellement d’insectes ; le manque de sites de nidification, en raison de la densification de l’habitat, de nouvelles habitudes architecturales et de la transformation des biens ruraux, sans oublier, la raréfaction des sources d’approvisionnement en boue, indispensable à la construction de leurs nids. À l’heure actuelle également, la tolérance envers ces oiseaux tend à diminuer : les salissures de fientes sont moins acceptées qu’autrefois par les propriétaires et locataires qui ne souhaitent plus les voir nicher sous leurs toits. À noter qu’enlever et donc détruire les nids d’hirondelles est punissable par la loi.

Conditions propices

À Blonay, on peut apercevoir ces oiseaux depuis de nombreuses années déjà. Ornithologue, professeur honoraire en biologie et écologie à l’Université de Lausanne et ancien directeur du Musée de zoologie de Lausanne, Pierre Goeldlin effectue chaque année le recensement de ces oiseaux sur la commune. « Une colonie de vingt nids a notamment élu domicile sur la propriété d’Élisabeth Mertens Viredaz, qui occupe une ancienne maison près de la Chapelle Saint-Antoine. Les autres se concentrent sur les bâtiments de la place du Village, qui ont un crépi rugueux et sur lesquels les nids s’accrochent bien », explique l’homme de science. Une situation que l’on ne retrouve pas du côté de St-Légier-La Chiésaz, où les conditions sont moins favorables à l’espèce. « Il y a par exemple beaucoup de granges ou de vieilles bâtisses qui ont des parois en bois sous les avanttoits. »

Création d’une gouille

Soucieux d’agir pour la préservation de l’espèce et déjà actif dans d’autres projets en ce sens, Pierre Goeldlin a ainsi l’idée, il y a quelques années, de proposer à la Commune de Blonay de créer une gouille à hirondelles de fenêtre. L’objectif : fournir la terre boueuse si utile à la confection de leurs nids. Ce sera chose faite en 2020. Situé sur une bande de terrain herbeuse, entre le parking de Tercier et le parking des Oches, le lieu d’implantation du plan d’eau n’a pas été choisi par hasard, mais bien là où les oiseaux avaient déjà l’habitude de s’abreuver. La zone est ouverte et plate, éloignée des activités humaines. Elle se situe à une courte distance des principaux sites de nidification. Nul besoin d’une grande surface pour implanter de façon durable le plan d’eau en question, puisque ce dernier, mis en activité dès l’arrivée des hirondelles en avril, mesure environ 10 m2.

Résultats très prometteurs

Les résultats ne se sont pas fait attendre. Si le village comptait 63 nids en 2019, ce nombre est aujourd’hui passé à 104. « Pour une espèce en voie de disparition, c’est assez remarquable, se réjouit le scientifique. L’an dernier, 96 de ces nids étaient occupés et tous ont été visités ». La gouille à hirondelles est entretenue dès l’arrivée des premiers volatiles et tout au long de la période de construction des nids, jusqu’au mois de juillet environ. Un travail effectué par l’ornithologue notamment et le service des Espaces verts de la Commune. « Nous veillons par exemple à maintenir le niveau d’eau et à dégager de toute végétation les pourtours de la gouille, qui servent de terrain d’atterrissage aux volatiles », commente Fabrice Signoret, chef du secteur des Espaces verts. Le plan d’eau sert également à d’autres insectes, à l’image des abeilles et guêpes maçonnes, qui elles aussi utilisent la boue ou l’argile pour construire leurs nids, de même qu’à d’autres oiseaux qui s’y rendent pour s’abreuver ou se baigner.

Favoriser la biodiversité sur la Commune

À noter que cette démarche s’inscrit en pleine conformité avec la politique environnementale de la Commune, qui a obtenu en début d’année le label « Bio suisse », renouvelable tous les 12 mois. Sur le plan pratique, elle a ainsi renoncé aux traitements et aux engrais chimiques sur l’ensemble de son territoire, y compris pour les terrains de sport. Elle entend désormais préserver et encourager la biodiversité par un certain nombre de mesures diverses : fauchage des prairies (surfaces pour la biodiversité) à l’aide d’une motofaucheuse à peigne et mise en place de tas de pierres ou de tas de bois en faveur de la microfaune, pose de nichoirs à oiseaux notamment.

Écoutez le cri des hirondelles en scannant le QR-Code ci-dessous :

COMM'une info n° 78 - mai 2024

Les hirondelles font le printemps à Blonay - COMM'une info n° 78
Photo : Christian Toffel